22 février
On nous reparle beaucoup de nos ancêtres, les Gaulois: vous, je ne sais pas, mais moi, je me sens plus proche de Cicéron ou d'Ibn Khaldoun que de ces gens-là - Nerviens, Atrébates, Viromandes! Il faut le génie de Rimbaud, son ardeur ironique, pour rallumer ces feux éteints; il faut un poète accointé à la nuit des temps pour revendiquer ces comparses intermittents et bornés, ces soudards à la "cervelle étroite", empêtrés dans leurs tresses blondes, et qui ne savent que brandir leurs griefs et leurs poings. Ont-ils été un peuple artiste, comme on le prétend aujourd'hui?
Je feuillette la nouvelle édition des "Oeuvres Complètes" d'Arthur RIMBAUD dans la Bibliothèque de la Pléiade (édition établie par André Guyaux, avec la collaboration d'Aurélia Cervoni). Ce n'est pas plus épais qu'un roman: ce que Rimbaud a écrit tient dans ma poche! Et encore, tout n'est-il pas de sa main, de son encre, dans ce volume: lettres de ses soeurs, de sa mère, de la femme de Verlaine ou d'Isabelle Rimbaud, etc. qui lui érigent une stèle. Sans parler de certains poèmes, recopiés par l'ami Verlaine, dont l'authenticité reste douteuse. Ils étaient si différents...
Lui, où est-il? Qui est-il? Je ne m'étais jamais aperçu auparavant, je l'avoue, à quel point Rimbaud nous reste opaque. On a transformé les épisodes de sa vie subie ou rêvée en trajectoire de comète, en carrière louche, en destinée. Au-delà d'une existence lacunaire, qui met en péril ses meilleurs biographes, qui était Arthur? Peut-on encore retrouver l'homme sous le mythe - sanctifié, solidifié, scolarisé, affiché, postérisé, mortel? Non, c'est impossible. Pas plus qu'on ne peut le suivre dans ses fictions: le chemin qu'il ouvre dans notre passé gaulois est un sens interdit, une impasse.
S'il sollicite ce lignage odorant de rustres, c'est pour s'abrutir et ricaner, en solitaire; c'est pour mieux se maudire et rigoler à la lueur de ces tristes aïeux. Rimbaud proclame sa désastreuse hérédité, il se frappe la poitrine, il s'abaisse; il ne retient de ces "brûleurs d'herbes" que leurs vices, ce qu'il appelle le mauvais sang. Il se serait réjoui des découvertes récentes des archéologues: nos gentils Gaulois, tous descendants de Dis Pater, le dieu de la mort, savaient l'art d'accomoder les fémurs et les crânes.
Rimbaux rêve sous l'oeil des Barbares, il fanfaronne en bricolant, à son seul usage, une généalogie de la perdition. Il cherche d'où il vient, mais plus encore où il va et à quoi il se destine: "Choisirai-je le nord / Ou le pays des vignes?" Ce sera finalement l'Orient: or, poudre, encens, périple. Le grand sommeil, enfin. Mirages et faux départs: "On ne part pas... Reprenons les chemins d'ici". Mais ici, "ça sclingue la neige". Adieu!
Rimbaud ne cherche pas d'exemple: il ne songe qu'à se nuire, il trempe son génie provisoire dans la colère, dans l'exode, dans le commerce. Il s'échappe, il s'engouffre, il se sauve. Notamment du ridicule.
Le ridicule, Chateaubriand y sombre, en 24 livres, dans "Les Martyrs", il faut relire ça! Truqueur comme pas deux, avec son âme de loup catholique et son penchant pour les épaves, il a flairé l'aubaine sous l'antique. Quelle fumisterie! Bouvard et Pécuchet, à leur tour, voudront spéculer sur le filon celte. Flaubert, plus finaud, trop normand pour être dupe a senti que tout est philtre, incantation, manigances dans cette clairière jonchée de gui et d'arrière-pensées. Le culte des Gaulois relève d'un seul genre: l'excès, c'est à dire le pastiche, la parodie, le colloque, l'expo.
Arthur le sait trop bien (et ce qu'il ne sait pas, il le devine): en recrutant les Gaulois, à rebours de ceux qui rêvent d'une genèse, d'une origine, il s'arrache, il se dénature, il se déracine. Mieux: il se débaptise. Il se moque de l'histoire et de la géographie, il se fout du monde, de nous, de lui-même. Il préfère l'oubli, la stupeur, le grondement inaudible des siècles. Il va plus loin encore: il rompt le contrat entre le mot et le sens, entre le moi et le monde. A sa manière, il devance le grand réquisitoire nihiliste de Nietzsche, généalogiste et philologue, comme lui.
Ce qui est unique, à ce degré-là, c'est son allergie au réel: "Quel malheur! Quel cloître possible pour ce beau dégoût?", écrit-il (dans un brouillon d'"Une Saison"), comme en écho à une lettre de Verlaine: "J'en appelle à ton dégoût de tout et de tous, à ta perpétuelle colère contre chaque chose".
Tout cela pour dire qu'il ne faut pas confondre "Une saison en Enfer", cette confession nègre, ce libre aveu païen, cette évasion, avec les pieuses gauloiseries du bréviaire républicain ou avec les dévotions du revival celte. Car, en effet, jamais homme n'eut pareil voeu!
Dis donc, Ephèfe, un p'tit peu de respect pour mes ancêtres gaulois, celtes : ya que des Bretons dans ma famille!Ou alors j'ai mal compris...
Rédigé par : ororea | 22/02/2009 à 00:02
Mais bien sur, ce n'est pas Rimbaud qui parle dans mauvais sang, c'est un masque, un personnage ridicule qu'il s'amuse à jouer pour en discréditer la philosophie. Un dialogue de "moi", moi du refus, moi de la critique, de l'ironie, de la provocation, de la bravade...ce n'est pas un discours auto-destructeur sincère ce moi divisé sur une résignation fragile, quelle ironie cette profession de foi !
Mais...
Je ne sais pas parler de Rimbaud, trop lu (ou pas assez), avec les yeux, le coeur, la raison, l'émotion, le rêve, la peinture, emmené partout et nulle part, par plaisir, beauté, sensualité, nécessité je ne peux plus le quitter...
Merci Frédéric, pour ce subtil clin d'oeil, cette"allergie au réel" !
Rédigé par : Anne B | 22/02/2009 à 01:48
LES FILS D'ARDUINNA
Les Gaulois sont invention
De César en personne
Que les Vandales adorent
Tandis que les hordes de Gengis
Marchent sur les tisons
Que leurs pieds enluminent
De saveurs orientales
Des chevaux sur la nuit
Aux plumes sanguinaires
Des étriers comme des fers
Pour exciter le goût du sang
Et dans le vent sans contrainte
Le son d'une cornemuse
Sur les terres du Highlander
A la table du roi Arthur
Règne la transparence
Que les guerriers contemplent
Strip-teaser sans relâche
En pure décontraction
Dans le poker intégral
D'une quinte flush au sang
Rédigé par : gmc | 22/02/2009 à 05:23
Ouais euh, c'est un petit peu sanglant, mais sinon, spa mal...
Rédigé par : ororea | 22/02/2009 à 13:00
Obama's FF :
http://www.youtube.com/watch?v=A_B5UrI7nAI
Rédigé par : ororea | 22/02/2009 à 13:05
http://www.amazighworld.org/history/personalities/img/Ibn%20khaldoun.jpg
Ouais, ya kekchoz
http://www.flickr.com/photos/90855855@N00/306840803/
pas convaicant, c'est pas carré...
Rédigé par : ororea | 22/02/2009 à 13:36
On pourrait dire qu'en Gaule on recycle bien le papier et pourquoi pas la bible ?
La mienne d'œuvre complète est un peu plus usée...texte établi et annoté par Roland de Renéville et Jules Mouquet (1963)
Et merci à gmc pour son Graal.
Rédigé par : Sylvaine | 22/02/2009 à 13:57
Toujours surprise de voir que j’en sais davantage sur les Gaulois que sur Ibn Khaldoun ou Averroës. Mais concernant les Gaulois, je m’en tiens avec bonheur à Astérix et son village. Le passage de Lyautey a donné ceci que le melting-pot est très présent et que j’ai longtemps cru qu’Agadir se situait près de Tanger (!) Ibn Khaldoun m’aurait crucifiée. (!) Amusant, ça.
Il est joli, votre bateau, Frédéric Ferney, mais vous n’avez pas mis de drapeau ?
Rédigé par : Yasmine | 22/02/2009 à 18:33
Yasmine, il faudrait mettre des drapeaux d'un peu partout, dont un drapeau breton, mais ça ne va pas plaire à Môssieur-FF-qui-n'aime-pas-les-celtes, ah je vous jure fan de FF, c'est pas une sinécure...
Rédigé par : ororea | 22/02/2009 à 19:38
Je n’avais pas pensé à ça, Ororea, mais puisque de bonnes nouvelles sont annoncées, des escales bretonnes sont peut-être prévues ! Courage, Ororea ! Soyez irréductible, et buvez de la cervoise en attendant.
Rédigé par : Yasmine | 22/02/2009 à 21:57
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Rédigé par : louis vuitton damier shoes | 12/09/2013 à 14:56
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Rédigé par : ルイヴィトン 財布 マルチカラー | 13/09/2013 à 02:58
Un Gaulois nommé Rimbaud? - Le Bateau Livre. Le blog de Frédéric Ferney
Rédigé par : Sac Longchamp pas cher | 21/09/2013 à 09:28
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Rédigé par : fibjvvjle | 21/09/2013 à 09:34