27 décembre
Le dramaturge anglais Harold Pinter, Prix Nobel de Littérature, nous a quittés à l’âge de 78 ans. Tout son art consistait à faire rire en faisant peur.
QUELQUES SOUVENIRS DE THEATRE :
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1993. « Le Retour » (« Homecoming »), au Théâtre de l’Atelier.
Peut-être sa meilleure pièce. Pinter invente une Sainte Famille blasphématoire, incestueuse et burlesque. D’un côté, les vivants : Max, le patriarche entouré de ses trois fils : Lenny, Teddy et Joey ; la femme de Teddy : Ruth. De l’autre, les morts : McGregor, l’éternel revenant, l’ami de Max, et sans doute le père adultérin de l’un des fils, et Jessie, la mère dont Ruth va prendre la place. Les personnages sur scène, crûment et sans détour, disent ce qu’ils pensent et font ce qu’ils désirent. Pas de phantasme : la part obscure et innommable, tout ce qui ailleurs dans le théâtre de Pinter est voilé s’exprime, se révèle, advient. A sa création, à Londres, en 1965, la pièce fit scandale : la femme du fils s’offre au père et aux frères ; Lennie, le proxénète, tient le discours du philosophe tandis que Teddy, le philosophe, agit en proxénète… Patrick Chesnais (Lennie) était le plus pintérien : c’est lui qui, dans ce spectacle, incarnait le mieux le désespoir hargneux, le délire, le danger et surtout l’humour de ce théâtre-là. Jean-Pierre Marielle (Max) s’écoutait proférer des horreurs comme s’il avait récité du Colette.Je me souviens que Marie Trintignant jouait Ruth, et Guillaume Depardieu, Joey.
1997. « L’Anniversaire » (« The Birthday Party »), aux Gémeaux à Sceaux.
Une petite maison au bord de la mer. Tout était frais, pimpant, balnéaire. Le ciel était bleu – trop bleu, inquiétant, exagéré. Deux types louches débarquaient à l’improviste dans ce décor idyllique et se mettaient à raconter leur vie minable avec des accents d’épopée. Le metteur en scène Stuart Seide avait annoncé : « Une série noire en technicolor ». Il avait réussi à styliser l’effroi des rapports de domination en ayant l’air de rigoler, un peu comme Stanley Kubrick dans « Orange mécanique » - « Singin’ in the rain » devenant le refrain du bourreau. Car, chez Pinter, tout est miné insidieusement par un double-langage, par la duplicité d’un dialogue qui peut facilement virer à l‘interrogatoire, puis au supplice. Du Sarraute en plus scabreux, en plus pervers. Toute la question, comme le disait Humpty Dumpty à Alice, est de savoir qui sera le maître.
1999. « Trahisons », (« Betrayals ») au Théâtre de l’Atelier.
Le mari, la femme, l’amant. Cette trilogie de fabliau ou de vaudeville, Pinter l’inquiète, la dévoie, la dépayse. L’amant et le mari sont presque interchangeables. Pas d’essences ni d’états chez Pinter mais des emplois indécis, fluctuants, fallacieux. Et l’on songeait aussitôt : rien n’est moins assuré aujourd’hui que le sexe sous la libération de son discours et la prolifération de ses figures. J’ai relu un peu de Baudrillard pour comprendre Pinter. Pas de manque, pas d’interdit, pas de limite, au moins en apparence. On croit ce qu’on veut, on croit faire ce qu’on désire, on se croit unique. On est post-moderne. Un cocktail amer de cruauté, de mélancolie et de cynisme : Pinter s’amuse à raconter une histoire d’amour à l’envers, en commençant par la fin. Sinistre ! Le chic, c’est qu’il parvenait à nous faire rire avec ça.
Le Retour est ma pièce Préférée, c'est la plus énigmatique.On en reste troublé.
Rédigé par : Anne B | 29/12/2008 à 23:04
Mis en scène à Paris cette saison, du 20 au 24 avril 2010 : HOT HOUSE !
Dès 19h30 au théâtre XL de Ménilmontant laissez vous entraîner par le théâtre de la menace d'Harold Pinter avec HOT HOUSE, une comédie noire et absurde...
"Dans un établissement hospitalier non identifié, conflits et luttes de pouvoir entourent Roote, « Monsieur le Directeur », mais quelle est la nature de cette menace ? Serait-ce le laconique Gibbs, toujours prêt à faire son rapport ? Ou l’insolent Lush, sarcastique et cynique ? L’envoûtante Miss Cutts ? Ou le naïf Lamb, responsable des serrures ?
A moins que Tubb le portier et son canard y soient pour quelque chose…"
"Hot House" dénonce les abus de pouvoir et d'autorité, et l'absurde des bureaucraties qui en sont responsables. Le théâtre de la menace d'Harold Pinter dénonce, sans concession, ces travers jusqu'à leurs pires extrémités.
Au total, 5 dates pour 5 fois plus de plaisir. Réservez vos places dès à présent soit par internet (http://www.menilmontant.info), soit en téléphonant directement au théâtre Ménilmontant (01,46,36,98,60). Et si vous le pouvez aussi, nous vous serons très reconnaissants si vous pouviez faire tourner ce mail sur vos boucles d'amis... Ca ferait plaisir.
Réservations possibles sur les sites suivants : www.ticketnet.fr, www.ticketac.com, www.citivox.fr, www.billetreduc.fr, www.theatreonline.com... vous avez l'embarras du choix !
Pour le lieu: Théâtre Ménilmontant à 19h30 15 rue du retrait, 75020 Paris
Rédigé par : Poloche, metteur en scène de HOT HOUSE | 06/04/2010 à 18:51
Suffering as I am with galloping post-Christmas toorpr, allow me to cheat by simply pasting a few words from my own blog: Talking of prospering in the applause of idiots brings me to the demise of Harold Pinter. Of course, his death is a loss to his family and friends but in the wider world of the arts (well, certain dark, mutinous corners of it, at any rate) there will be much cheering, muted, naturally, out of good manners, but cheering none the less. It isn't just that his plays are boring but the fact that he wasn't very good at being boring. Nowhere did he reach the depths of turgidity achieved by, say, Samuel Beckett, whose plays resemble absolute zero temperature in that all signs of life, on stage and off, seem to have disappeared! Pinter's texts are a series of non-sequiturs whose random and puzzling nature disguises an author with absolutely nothing of any interest to say. Alas, we must standby for a year of Pinter revivals and then, hopefully, the poor man can sink into the theatrical obscurity which he so richly deserves. And, please, don't get me started on his non-poetry! Yes, I think that sums him up rather well!
Rédigé par : Pedro | 28/05/2012 à 09:47
From Alex, on our facebook page: This is very siailmr to the argument about banning books. Both books and theater do have an undeniable power. Yet, for as long I have thought about the issue, I have not figured out what makes it so. Why two people will read the same book, see the same play, and one person is inspired and the other person thought it was terrible. Yes, theater can change the world. As proof, I offer Eve Ensler's The Vagina Monologues. To the question about how to support playwrights in other countries, I don't have an answer. All I can say is that I'm immensely grateful for the people and places here who support independent theater.
Rédigé par : Raul | 21/04/2013 à 20:06