8 février
LU: "Hongrie" d'Anne-Marie GARAT, blason, (Actes-Sud).
Par la faute d'un pouce un peu vif, j'ai défloré hier mon sujet de ce jour, pardon. Je disais donc: on n'a pas de souvenir d'une odeur, c'est l'odeur qui convoque le souvenir. Peut-être n'est-ce que cela la "Hongrie" pour Anne-Marie Garat: une odeur qui la relie à son enfance et qui ressuscite des voix oubliées mais c'est une odeur abstraite, fictive, inventée. Une sensation vague, indécise, lancinante, née d'une promenade dans la brume au petit matin: "Avant que nous ne nous quittions, marchons un peu sur ce chemin, jusqu'à l'arbre là-bas, et d'ici là dis-moi: pourquoi la Hongrie?..."
Ca commence comme ça, parmi les oliviers et les vignes de Montepulciano qui donnent le cépage grenat du sangiovese, entre les collines de Sansepolcro où Piero della Francesca peignit à fresque et le hameau médiéval de Bagno Vignoni dont Tarkovski en exil fit le décor de son film "Nostalghia". Cette question anodine posée par un ami désempare Anne-Marie Garat. Pourquoi dans ses livres parle-t-elle autant de la Hongrie à quoi rien ne l'attache? Elle n'y avait jamais songé. Aussitôt, ça devient une chose obsédante et douce, presque un tourment.
A sa connaissance, il n'y a pas un seul Hongrois dans son ascendance. D'ailleurs, arbres, branches, généalogie, elle se défie de "cette botanique-là". Elle sait seulement que ses ancêtres sont béarnais ou girondins et que la Grande Guerre fut leur seule odyssée. "Non, parmi les gens de landes, de vignes et de montagnes gasconnes, d'où viennent les miens, pas un voyageur, un exilé d'aventure ou d'accident, n'est venu de cette direction ou parti vers elle", dit-elle. La balade bucolique se prolonge, un orage éclate, le tonnerre gronde: "Mon père tonnelier disait de ces fracas: entends le Bon Dieu, il roule ses barriques dans la campagne".
Alors quoi? L'auteur ne sait pas. "Qui peut prévoir la courbe d'un mot, une fois lancé? Il part comme un caillou, ricoche et file, sa course finit on ne sait où, il est perdu parmi les mille semblables du chemin... il rayonne tel un diamant caché". La méditation épouse les ondulations du paysage, d'autres souvenirs affluent au détour d'un pré ou à l'orée d'un bois. "Peut-être ce pays de Hongrie, risquais-je, à part moi, ou tout autre d'Europe centrale, incarne-t-il pour ma génération les convulsions du vingtième siècle, territoires morcelés, raturage de cartes et frontières".
Mais encore? Anne-Marie Garat se ressouvient de ce vieil appareil de photographie à soufflet, hérité de son père, un Voigtländer format 6x9, une petite merveille. "Connais-tu l'intérieur d'un appareil à soufflet? C'est étrange, organique, érotique. Prothèse métallique, oeil de verre au fond enfoui dans ses replis de cuir, lové comme celui d'un saurien". Elle revoit une photo d'André Kertesz, datée de 1918: six jeunes femmes marchant sous la pluie, rieuses et légères, chapeautées, en manteau d'hiver. En ce temps-là, la revue Nyugat prônait l'amour libre, le pacifisme et la psychanalyse. Quoi d'autre? Ah! si, bien sûr, il y a cette histoire de "la petite Hongroise perdue" qui fut son amie jadis mais ne l'a-t-elle pas inventée? "Cette enfant illisible me manque, elle me fait défaut. Toujours j'entends sa voix, son timbre, son appel; au fond de l'impasse, nous avions un dialogue intense, irréparable". Et puis? Allons jusqu'à l'arbre là-bas, assis comme un roi au bord du chemin...
Anne-Marie Garat nous offre un "blason": inspiré par l'héraldique, ce jeu littéraire qui fleurit aux XVe-XVIe siècles consistait à décrire, dans la forme d'un éloge ou d'un blâme, un objet ou une partie du corps, un animal, un vêtement ou une ville. En exil à Ferrare au moment des guerres de religion, Clément Marot blasonna le "beau Tétin" (sic); son ami Maurice Scève célèbra le Front, la Larme, le Sourcil, la Gorge. Pourquoi pas la "Hongrie"? Il ne s'agit pas de trouver "un endroit où aller", il s'agit seulement d'en revenir en songe. Il ne s'agit pas de visiter un pays, réel ou rêvé, il suffit d'en imaginer les contours, d'en accueillir la promesse, la primauté, la secousse à l'intérieur de soi.
Pour Anne-Marie Garat, on l'a compris, la Hongrie est l'autre nom de l'enfance, un symbole enchanté, un sphinx grave et gracieux. Une fière licorne cachée dans une savonnerie de soie. Son livre est une invitation à l'errance et à la mélancolie dans l'allure vivace d'une rhapsodie. C'est aussi, pour elle, la seule façon de ne pas rentrer bredouille de son rêve.
Et non on est pas encore le 8 février, c'est une manie hein ! lol
Rédigé par : Claire Ogie | 07/02/2009 à 10:40
Il publie un petit bout et il faut attendre minuit quinze pour la suite : c'est pour nous rendre accro, après on paiera pour notre drogue quotidienne!Malin.
Rédigé par : ororea | 07/02/2009 à 11:09
mais je ne vous quitte pas.
la Hongrie ? pour les thermes...
;o)
Rédigé par : Alistrid | 07/02/2009 à 12:41
Oliviers, vignes, Piero della Francesca, Tarkovski, Marot, Scèves, sphinx et licorne ... que de beautés convoquées ... Anne-Marie Garat à l'air charmant et charmante ; j'espère un jour la découvrir, émerveillée comme quand j'ai découvert le fabuleux réalisateur hongrois Bela Tarr :
avis aux amateurs :
http://www.youtube.com/watch?v=VFmu7BYbthY
*
Encore pour le plaisir :
De soy-même
Plus ne suis ce que j'ai été
Et plus ne saurais jamais l'être
Mon beau printemps et mon été
On fait le saut par la fenêtre
Amour tu as été mon maître
Je t'ai servi sur tous les dieux
Ah si je pouvais deux fois naître
Comme je te servirais mieux
Clément Marot
Rédigé par : ardentepatience | 08/02/2009 à 04:06
"Si je voulais faire de l'ironie, je dirais que le développement historique du pays qui a vécu l'absolutisme éclairé du XVIIIe siècle l'a amené aujourd'hui au totalitarisme libéral."
Imre Kertész, "Dossier K."
Rédigé par : julien de kerviler | 08/02/2009 à 04:12
Surement que je ne comprends pas comme il faut, car comme d'habitude je n'ai pas lu le livre dont parle Frédéric Ferney.
Mais un écrivain se servant d'un mot en pensant qu'il est creux et qu'il peut le remplir à son aise, ça me laisse sur le bord du chemin.
Rédigé par : mme petit poisson | 08/02/2009 à 10:30
Livre enchanteur, simplement intitulé "Hongrie"...
Comment ne pas avoir envie de se laisser griser par la lumière de la grande plaine,du vent qui fait friser le vert de l'herbe, de sentir l'avancée des coulées sombres des forêts.Le charme et la gaieté de
la Hongrie, (malgré une histoire mouvementée), ces contrastes géographiques, sont un trait d'union entre l'Orient et l'Occident, c'est sa force, sa poésie.
Les écrivains sont souvent les meilleurs guides "touristiques"(le vilain mot),j'ai eu envie de la Hongrie à "cause" des livres d'Alain Fleischer.
Le "point commun" de l'Italie avec la Hongrie:
Les couleurs des jours et du temps, toutes ses choses "irréelles" mais palpables qui font du monde un opéra , un rêve d'artiste...
Italie, Hongrie,ne pas oublier d'emporter ses carnets de croquis et ses crayons de papier biens taillés (j'ai envie de dire bien aiguisés).
J'aime entendre mes amis toscans prononcer Montepulciano avec fierté et douceur.
P.S C'est Anne-Marie Garat qui a écrit l'histoire de cette jeune femme intrépide menant une périlleuse enquête d'amour n'ayant que pour tout indice un sulfureux cahier hongrois confié par un ami décédé?
J'ai honte d'en avoir oublié le nom de l'auteur.
Rédigé par : Anne B | 08/02/2009 à 11:22
Anne B.,
Ce livre dont vous parlez en post-scriptum, n'est-ce pas "Istvan arrive par le train du soir" d'Anne-Marie Garat?
F.F.
Rédigé par : Frederic ferney | 08/02/2009 à 11:36
@ Julien de Kerviler : quid du sinistre et sordide XIXe siècle... ?
Rédigé par : Christophe Borhen | 08/02/2009 à 13:17
"Par la faute d'un pouce un peu vif, j'ai défloré hier mon sujet de ce jour, pardon"
Un ami méchant et jaloux me souffle qu'il faut bien être vif de quelque part...
Rédigé par : ororea | 08/02/2009 à 13:51
Merci Frédéric, j'ai mené ma petite enquête du côté de mes "vieux" Moleskine(s); en fait il s'agit de "Dans la Main du Diable" apparemment de 2006 le roman se déroule juste avant la guerre de 1914, de Budapest à la Birmanie en passant par Venise. J'ai aussi retrouvé des notes sur "Aden" du même auteur (1992), ce sont des livres que je n'ai pas dans ma bibliothèque, et pour réveiller ma mémoire mes carnets me sont de précieux alliés.
Son écriture est assez visuelle (elle enseigne le cinéma et la photographie, il me semble) et la psychologie de ses personnages féminins fine.
.
Rédigé par : Anne B | 08/02/2009 à 15:12
"Qui peut prévoir la courbe d'un mot, une fois lancé? Il part comme un caillou, ricoche et file, sa course finit on ne sait où, il est perdu parmi les mille semblables du chemin... il rayonne tel un diamant caché".
Je ne voyais pas ce mot de cette façon, mme petitpoissson, pas comme un mot creux « que l’auteur peut remplir à son aise », mais plutôt comme un mot riche de sens qui peut en induire mille autres, évocateur d’émotions, faisant « chaîne », en quelque sorte. Mais, comme vous, je n’ai pas lu ce livre ! Ca n’empêche pas d’interpréter et de ressentir, après tout. Et puisqu’il est aussi question de l’enfance, ce mot qui part, ricoche et file, commençant et finissant et recommençant encore, c’est peut-être aussi cet enfant qui commence, et « finit sa course on ne sait où, perdu parmi les mille semblables », mais qui rayonne malgré tout, car bien évidemment il est unique. Mais les mots ne sont quelquefois que des mots, (à l’instar du cigare de papa Freud), et peuvent faire piège. Je ne peux m’empêcher de citer Nils Daum : « …en apprenant beaucoup de choses (et donc de mots), nous devenons savants. En accumulant les notions, nous devenons érudits. Toute autre est la découverte. Par l’apprentissage, nous devenons riches, par la découverte, nous devenons sobres. Et si les deux mouvements sont strictement complémentaires, l’apprentissage dont le but ne mène pas à la découverte mène au néant. »
Alors, quid de l’enfance ?
Désolée si j’ai fait intrusion.
Rédigé par : Yasmine | 08/02/2009 à 19:28
UNE BULLE DE TOKAY
Un rêve d'organza
Déploie ses fastes
Au milieu des arbres
Qui plient sous le rire silencieux
Des facteurs d'orgue de Staline
Aux katioushas incandescentes
Dans l'aurore qui joue
Sur les rebords d'une corolle
A la chapelure de soie
Et au parfum enivrant de velours
Rédigé par : gmc | 08/02/2009 à 19:48
Un petit poisson sur le bord du chemin, ça laisse rêveur.(Inutile de disserter là-dessus)
Je trouve que certaines personnes ici semblent fragiles des nerfs. Je les imagine bien, derrière l'écran, à l'affut. Au moindre écart, ces personnes tartinent leurs sciences.
Heureusement, on est encore libre de penser ce qu'on veut en France.
Rédigé par : Charles | 08/02/2009 à 20:11
A vous lire, il n'y paraît pas. Mais inutile de disserter là-dessus, les mots ne sont parfois que des mots.Et l'on attribue souvent aux autres ce que l'on fait soi-même, derrière l'écran, à l'affut.
Quant aux tartines, je les aime autant que les camions, mais je les préfère au miel plutôt qu'au fiel.
Namasté.
Rédigé par : Yasmine | 08/02/2009 à 22:37
De bon matin,
je viens,
et je lis les commentaires.
Ouh là là... mais on dirait une cours de récréation ! ça se crêpe le chignon...
;o)
Rédigé par : Alistrid | 09/02/2009 à 05:41
http://www.youtube.com/watch?v=Zzc6K8QpUwI
Rédigé par : Alistrid | 09/02/2009 à 05:55
@yasmine
oui, c'est ça: tais-toi quand tu parles !
;o)
Rédigé par : Alistrid | 09/02/2009 à 06:42
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