2 février
VU/ENTENDU: "A la Recherche du Temps Perdu" de Marcel PROUST, Lecture d'instants choisis par Robin Renucci, Bernadette Laffont et Xavier Gallais (Comédie des Champs-Elysées).
Les trois comédiens sont vêtus de noir, comme s'ils célébraient un rite. Rien de solennel pourtant: ils se succèdent sur la scène avec une gravité souriante, comme si Proust n'était qu'un ami momentanément disparu ou absent. Robin Rennucci commence par le début: "Longtemps je me suis couché de bonheur..." Aussi périlleux à dire que "To be or not to be, that is the question...", dans "Hamlet". C'est le moment où on peut pouffer bêtement. Robin Renucci, très élégant, genre hidalgo habillé par Paul Smith, s'en sort avec un brio qui passe d'abord inaperçu tant l'acteur semble refuser tout effet, tout éclat.
J'aime cet acteur pour sa force de conviction, son élan, sa probité qui transpirent jusque dans les silences qu'il s'impose, entre les phrases. Il trouve une chose qu'on aime si on aime Proust: la lenteur. Avant l'Ecole des Annales, Proust a inventé le temps long. Et en même temps, chaque instant court comme un furet par en-dessous. C'est magnifique. Un peu symphonique bien sûr mais léger, pas de cuivres, rien que des cordes, avec je ne sais quoi de flûté. Robin Renucci sait tout cela, je crois, et s'il ne le sait pas, il le sent. Il dit l'âme inquiète du petit Marcel, la perception presque maladive (dont il fera son arme secrète d'écrivain) et ce loisir enchanté que devient en prose la tristesse. Il dit Proust.
Parfois, mieux vaut ne pas vouloir tout comprendre de ce que dit Proust, faire confiance à la phrase qui le sait d'elle-même; elle a a son mouvement, son instinct, il ne faut rien forcer. Ce qu'écrit Proust est aussi éloquent à l'oral, on comprend que les comédiens adorent ça.
A côté du Proust sensible, il y a aussi un Proust, un peu titi, gouailleur, sous ses bottines, quand il fait parler Françoise ou la Tante Léonie, quand il fait parler les pauvres, la province ou la bourgeoisie. C'est là que Bernadette Laffont, radieuse comme une première cerise, arrive: elle y est épatante de jeunesse conquise, comme si la mère était devenu sa fille. Ce Proust-là nous déballe les potins de la commère à Combray, et c'est une truculente rêverie. Il y a peut-être un côté cul-pincé chez ses dames que Bernadette, si spontanée, si libre, peine à rendre mais quelle belle vitalité!. (Tiens, j'y songe, j'aurais adoré entendre la voix de Madeleine Renaud dans Françoise, une voix d'avant la télé.)
Enfin, il y a un troisième Proust: Xavier Gallais incarne l'esthète brillant, cruel, et qui mord dans les codes de la mondanité, les convenances, les rubans. C'est le Proust satirique, équivoque, canaille. Xavier Gallais le fait très bien, il montre sa perception si fine du détail, c'est parfois scabreux (entre Charlus et Jupien, monsieur le Baron en a un gros pétard!...), souvent cruel, et c'est peut-être là que se cache le fonds de sa mélancolie. Xavier Gallais interprète Proust, il (nous) le joue.
Une seule critique (mais en est-ce vraiment une?): les comédiens assument leur partition individuelle en clignant de l'oeil amicalement vers leur partenaire, cool, mais ils ne forment pas tout à fait un choeur, soudé, unanime, musical, comme savent le faire les Russes, les Allemands. Chez nous, chacun veut conserver sa voix. C'est très français, ça. Bon j'arrête, la vérité est que j'ai passé une agréable soirée. D'ailleurs, pas un seul mari fatigué dans la salle n'a baillé une seule fois.
La suite vers minuit quinze?
Rédigé par : ororea | 01/02/2009 à 21:55
Happiness or early, that is the question.
Rédigé par : mme petit poisson | 01/02/2009 à 23:42
La prose de Proust libéré du bloc compact de la page s'infiltrant dans le corps de Robin Renucci ...mots irradiés dans toute la salle, non ?
Renucci est un acteur simple et attachant, privilégiant au "starsystem", une générosité gourmande pour la poésie (c'est dans son regard), un inexorable esprit critique qui éveille les consciences;
La malice et l'intelligence que dessine son sourire, me font "craquer"!
Il est fulgurant dans "Escalier C", "Masques", "Le soulier de satin" (mis en scène par Vitez)...
Une citation du comédien notée sur un Moleskine:
"Je prône l'émancipation de l'individu par la force créatrice, la réflexion et l'éducation."
Rédigé par : Anne B | 01/02/2009 à 23:56
Je m'aperçois que j'ai commis un joli lapsus: "de bonheur" à la place de "de bonne heure".
Interprétez cela comme vous voulez!
F.F.
Rédigé par : Frederic ferney | 02/02/2009 à 01:04
Je m'aperçois que j'ai commis un joli lapsus: "de bonheur" à la place de "de bonne heure".
Interprétez ça comme vous voulez!
F.F.
Rédigé par : Frederic ferney | 02/02/2009 à 01:07
Cher Frédéric,
Ce lapsus est charmant...
(je poste mes commentaires trop vite, pardon pour "libéré", moi je suis incapable de tenir un blog...)
Rédigé par : Anne B | 02/02/2009 à 07:42
D'accord avec vous Anne, il est charmant Frédéric.
Et quel sourire espiègle...
Rédigé par : Alistrid | 02/02/2009 à 08:11
Je vous ai laissé une note sur votre post du 31 janvier mais je ne vous ai pas donné mes coordonnées afin que vous puissiez me joindre comme je vous le demander. Les voici donc en espérant que vous m'enverrez votre adresse mail. Merci. [email protected]
Rédigé par : LIEUTAUD | 02/02/2009 à 08:32
Vous dites que vous auriez aimé entendre Madeleine Renaud dans Françoise. Je me souviens l'avoir vue, à la télé, peut-être dans une émission de Claude Santelli (Théâtre de la jeunesse?, dans les années 60, en noir et blanc), dans tante Léonie, et c'était Denise Gence qui jouait Françoise. J'étais alors un enfant et, depuis, lisant Proust, je pense toujours à elles.
Rédigé par : Madeleine Renaud | 02/02/2009 à 08:35
Je partage votre enthousiasme pour le jeu sensible et sobre de Robin Renucci que j'ai beaucoup apprécié l'an dernier dans une adatation théâtrale du livre "Le Pianiste" (celui-là même dont Polanski a tiré son célèbre film). Mais pourquoi donc cette mention finale des "maris fatigués" ? Faut-il forcément être "maris" pour être "fatigués " (et réciproquement) ?
Rédigé par : Franck Bellucci | 02/02/2009 à 08:48
TABLE A REPASSER
Le temps se couche toujours
De bonne heure
Quand l'escalier assis
Se tient debout
Sous les glycines
A écouter les parfums discuter
De tout et de rien
Du temps qui passe
De celui qui ne passe pas
Du regard posé sous les deux
Au coin de l'oeil
D'une respiration tranquille
Rédigé par : gmc | 02/02/2009 à 08:52
Comme pour un piano...
Rédigé par : unevilleunpoeme | 02/02/2009 à 10:18
Franck, je partage votre émotion pour l'adaptation scénique du "Pianiste",R. Renucci est tout entier imprégné par l'oeuvre de W.Szpilman,les moments d'horreur, de courage, de souffrance sont restitués sans tomber dans la sensiblerie, et Milkail Rudy qui l'accompagne(en alternance avec Nicolas Stavy) laisse parler la musique.
Rédigé par : Anne B | 02/02/2009 à 13:49
Frank,
Souvent j'ai pitié de certains maris que leur femme traînent au théâtre après une journée de boulot: ils n'ont qu'une envie, c'est de s'avachir sur le canapé du salon en regardant une connerie à la télé, mais si, chéri, "Télérama" dit que c'est bien, tu verras, ça va te plaire.
C'est tout.
F.F.
Rédigé par : Frederic ferney | 02/02/2009 à 14:47
... Je veux dire: "traîne", pardon.
F.F.
Rédigé par : Frederic ferney | 02/02/2009 à 14:49
Oui, c'est vrai, elles n'ont qu'à y aller seule. !
Rédigé par : Alistrid | 02/02/2009 à 15:19
Proust à trois voix, j'en imagine davantage...
"Bonheur" pour "bonne heure", ça fonctionne très bien et à l'oreille et pour le sous-texte.
Rédigé par : Tania | 02/02/2009 à 15:38
"D'accord avec vous Anne, il est charmant Frédéric."
Oui, mais qui l'a vu en premier?(moi je suis fan depuis dix ans...)
Rédigé par : ororea | 02/02/2009 à 17:18
Ororea, peu importe... il m'aime, c'est sûr
(rires)
Rédigé par : Alistrid | 02/02/2009 à 17:24
Nan c'est moi qu'il aime ;-), le plus triste c'est qu'ils ont gardé sa photo dédicacée à l'HP Saint Anne pour mettre dans mon dossier...Y'avait juste marqué FF à l'encre derrière.
Rédigé par : ororea | 02/02/2009 à 17:42
Moi c'est Bernadette qui me charme...pas celle qui pourrait être sa fille...
je la revois sous les foins et avec sa chèvre dans "La fiancée du Pirate"
Quant aux lapsus de FF c'est presque lisible chez gmc...question de repassage. Il y aura sûrement un bis pour cette pièce.
Rédigé par : Sylvaine | 02/02/2009 à 18:01
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Rédigé par : Buy Oreo 5s | 16/11/2013 à 14:20