3-4-5 avril
Lu: "Journal, 1973-1982" de Joyce Carol OATES, traduit de l'américain par Claude Seban (Editions Philippe Rey).
Quel livre! J'y suis entré à contrecoeur, avec une appréhension comme à chaque fois que j'aborde un ouvrage de Joyce Carol Oates. C'est un ange du bizarre, un peu zèbre, un peu fille. Avec elle, on sait qu'on va avoir peur, que ça fera mal, et qu'elle sera sans pitié pour le lecteur aux abois. On se sent comme Achille, piteux et vaincu, devant la reine des Amazones. On ne fait pas le poids.
Oui, je ne vais pas mentir, c'est un auteur qui me met souvent mal à l'aise, qui me fout les jetons, ravivant des terreurs enfouies - celles qu'on éprouve, enfant, quand on vous lit "Hansel et Gretel", remember! Avec cela, elle a une bille de chouette, de l'insomnie dans la prunelle, une lueur noire qui la dévore et qui fait son oeil immense - je sais, ça n'a rien à voir, et puis ce n'est pas méchant une chouette mais bon, la nuit, seul dans une forêt, quand on est tout petit...
Au bout de quelques pages, j'étais littéralement... séduit? Non, pas séduit. Charmé. Envoûté. C'est un écrivain sauvage. Un rôdeur de limites. Une chatte noire sur un toit brûlant. Elle va là où il ne faut pas, là où c'est interdit. Tant d'écrivains se croient dangereux, pauvres chéris, Joyce Carol Oates, elle, ne croit pas l'être. C'est une nitouche. Et puis on se rassure, on se dit qu'elle enseigne à Princeton, et tout le bazar, et donc que ça ne sera pas bien méchant. On ne se méfie pas. On a tort. Car soudain, là, au détour d'une phrase, elle vous cueille avec sa mortelle douceur, comme un aspic. Tout s'émeut, tout conspire. C'est une petite soeur perverse, anorexique, maléfique, de Virginia Woolf. Sorcière!
Il y a quelquechose dans la langue qui ne désire pas s'écrire et qui brûle de l'être. Aragon a beaucoup joué en virtuose avec ce double-bind un brin hystérique. Joyce Carol Oates y excelle tout en feignant de ne raconter que des choses ordinaires: les soirées au coin du feu avec Ray, son mari, un chaton sur les genoux, les rêveries au piano avec une mazurka de Chopin ou de Liszt. "La plus domestique des vie, la plus bénie"... Oui, sans doute, mais il y a une fuite de gaz, une mélancolie, je ne sais quoi d'empoisonné, de suicidaire, qui affleure, qui advient, dans la trame de ce tableau idyllique.
On a beau vouloir considérer le journal intime comme une activité secondaire ou adventice, un chemin de ronde qui entoure et protège l'oeuvre, éclaire l'auteur, jongle avec le lecteur, ce n'est pas le cas: ce "Journal" est un livre majeur dans la carrière d'ailleurs inégale (elle a beaucoup écrit) de Joyce Carol Oates. Il me semble surtout qu'il me la rend plus obscure et plus fascinante encore.
C'est rare un écrivain qui se met à nu et qui ne triche pas, capturant les heures fugitives qui "nous frôlent comme des moucherons". On parlait récemment du "Journal " de Gide: auprès d'elle, ce vieux Scapin paraît confit en simagrées, retors, insincère. Je n'en dis pas plus, faute d'un mot pour décrire, à l'inverse, la sincérité quand elle se surpasse.
Ce sont les paysages de l'âme que Joyce Carol Oates explore. Un peu schizo? Si vous voulez mais, pour elle, la plupart des termes cliniques de la folie sont grossiers: "Autant essayer de désherber un jardin d"herbes aromatiques avec une hache". Elle préfère la serpe, qui lui permet de caresser les serpents qui dorment sous les pierres. Rien de narcissique. Relisant des pages de son propre journal, elle s'étonne que son "Je" ne soit pas reconnaissable: "Rien de ce que j'écris me représente-t-il jamais?"
C'est enfin une méditation subtile sur un thème obsédant: l'écriture, comme du sang muet qui coule et qui attaque le papier. Et sur l'Amérique. ("Quand on est américain, on est optimiste, sinon on est foutu", disait un personnage de son roman, "Blonde", consacré à Marilyn).
Encore ceci: c'est un écrivain aventureux, d'une ambition inouïe, comme Proust. Quel livre!
Elle est un de mes auteurs préférés, j'ignorais l'existence de ce journal et l'ajoute à ma liste.
Rédigé par : Loïs de Murphy | 03/04/2009 à 10:48
"C'est rare un écrivain...qui ne triche pas"
ce n'est pas rare, ff, ça n'existe pas et ça ne peut pas exister^^ (dans le meilleur des cas, ça existe sans exister, et encore, c'est bien pour vous faire plaisir).
"l'écriture, comme du sang muet qui coule et qui attaque le papier"
hemingway a eu ce mot, "There is nothing to writing. All you do is sit down at a typewriter and bleed. ", à partir duquel j'ai écrit ce petit texte:
A BLOODY RAIN
Bleeding on paper
Like a snowy avalanche
Falling from under the sea
On an ocean of white clouds
During the darkest night
Ever seen over the rainbow
Bleeding water by the sword
Lightning strikes with green aura
Firebolts upon the river flow
In arabesques of silk
Rédigé par : gmc | 03/04/2009 à 10:54
J'ai honte, j'ai honte, mais moi aussi j'ai peur de cette auteure, comme j'avais peur de Hansel et Gretel, oui tout comme vous, Frédéric Ferney, et donc je me tiens à distance.
J'avoue que Blonde trône dans la pile des livres non lus et pourtant cela devrait être facile, une biographie de Marylin... et bien non.
http://anthropia.blogg.org
Rédigé par : Anthropia | 03/04/2009 à 12:03
Alors, là ! Si ce n'est pas à se précipiter dessus ! Je veux lire "un ange du bizarre, un peu zèbre un peu fille" et qui donne les chocottes.
Rédigé par : pagesapages | 03/04/2009 à 12:55
Un petit poème :
J'ai bu un elixir
qui relance mon désir
un philtre d'amour
qui m'émeut tous les jours
J'ai retrouvé le plaisir
et le désir de guérir
c'est pour janvier 2010
juste le temps que tu t'immisces
Toi tu pourrais fuir
ignorer mon désir d'écrire
non je ne suis pas schizo
mais je n'ai pas guéri tous mes maux
Passe moi la brosse à reluire
j'ai peur que tu te tires
c'était juste un an de bouffée délirante
et cinq ans de posologie perturbante
Mais moi je vais m'en sortir
et toi tu ne vas pas t'enfuir
On sera amis ou amants
mais finis, les médicaments!
Rédigé par : ororea | 03/04/2009 à 18:11
Joyce carol Oates écrit plus vite que son ombre, heureusement, elle se lit vite!
traverser les blessures de l'Amérique, les violences, le racisme, les faits cruels et bruts, les destins dramatiques, le pessimisme, l'innocence qui rencontre le mal, la perversion, le maléfice, la faute, l'odieux, le burlesque, la pitié,l'angoisse et la peur féminine....tout cela vous tombe dessus en l'espace d'une journée...il est préférable de s'enfuir, la psychologie disséquée est un véritable démon, "Les délicieuses pourritures" vous rattrapent.
De terribles et belles "chutes" de mots interpellent l'histoire du pêché originel.
In the desert
I saw a creature, naked, bestial,
Who, squatting upon the ground
Held his heart in his hands,
And ate of it.
I said, "Is it good, friend?"
"It is bitter-bitter, he answered,
"But i like it
Because it is bitter
And because it is my heart."
Stephen crane
P.S "envoûté" par son journal, je veux bien essayer
Rédigé par : Anne B | 03/04/2009 à 22:07
J'aime beaucoup cet auteur également et merci pour "le tuyau". Elle me fout un peu les jetons aussi ... surtout après la lecture de "Délicieuses pourritures" et "Infidèle, histoires de transgression".... et beaucoup d'autres en fait. Je redoute le pire et le meilleur pour "Eux" que je n'ai pas encore lu ("du Zola... made in America" selon Marianne...) au-dessus de "ma pile de livres à lire...". J'aime bien rentrer dans ses univers glauques. Moi c'était pas Hanzel et Gretel , c'était Alice au pays des merveilles !! A chacun ses terreurs !!
Rédigé par : Miss Pompadour | 04/04/2009 à 10:41
Missing you :
http://www.youtube.com/watch?v=Fi2AdibjwBg
Rédigé par : ororea | 04/04/2009 à 21:47
"The gravedigger's daughter" vous fera comprendre que l'exil est un désastre,que parmi vos proches, certains sont en exil, même s'ils ne sont pas partis bien loin et qu'ils y ont perdu la raison.Vous serez embarqués, non pas comme souvent chez J C Oates par un conte de fée qui tourne au malheur mais par l' angoisse de celle qui fuit son passé, jusqu'à même refuser de reconnaitre son frêre; écoutez:
"Just, you look kind of-familiar, ma'am? Like somebody I used to know. My brother Herschel and me and my sister Rebecca, we used to live in Milburn....I left in 1949.
-Mister, I don't think think so, no.
Mister was not a word Hazel Jones ordinarily used, not in this tone.There was something crude and dismissive in her speech, that was unlike Hazel Jones. Zack allowed himself to be pulled with Hazel , like a small child.
-Who was that man,Mom, he knew you.
-No, he didn't.
-And you knew him, I saw that.
Très bonne lecture à vous tous
Je vais me procurer le "Journal"; I can't wait!
Rédigé par : AME 91 | 07/04/2009 à 10:15
JC Oates en rencontre-dédicace le samedi 4 Juillet à 16h au Virgin Megastore Champs-Elysées, à l’occasion de la parution de son nouveau livre « Journal 1973-1982 ».
+ d’infos : http://virginmegastore.fr/evenements_3.html
Rédigé par : Coralie | 29/06/2009 à 15:39
Many institutions limit access to their online information. Making this information available will be an asset to all.
Rédigé par : Research Paper | 21/05/2010 à 19:21
Not a bad video, Host, although next time go with an even tieghtr shirt. That’s what tough guys wear, at least the kind who live in Sodom and Gomorrah. Pardon me, New York and San Francisco. Couldn’t you have got the chick with the brass tits to read my rejection? Is she giving out any consolation prizes?Whoops a daisy… am I not supposed to write here? Sorry, I was just following Tess’s lead (who just got rear ended with a strap-on from an annabones-in-the-buff).Tess, just so you know, you’ve got the wrong guy. Fido is the one who pisses in people’s backyards. I walk through the front door without knocking. Except in your house, that is. The front door is always locked so I go through the back. Good of you to keep it wide open for us.
Rédigé par : Daniela | 27/05/2012 à 16:55
ErosAt least Tess is not tasteless. So to aswner your question yes i prefer to read about an airhead trying NOT to get laid in New York rather then some jackass trying to turn my stomach. Love, ErosPS. I didn't vote for ether of them though
Rédigé par : Sandip | 30/05/2012 à 04:47
An accurate relative merely what person overlooks your own backsliding and even tolerates a person's success.
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Rédigé par : Tee Shirt YMCMB Pas Cher | 09/09/2013 à 03:11
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Rédigé par : jwleomwqyt | 17/09/2013 à 02:00